Merci Gérard
Les deux chapitres qui vont suivre, sont malheureusement le reflet d’un constat dramatique pour les abeilles. Mais je me dois d’en parler.
Il n’est pas lieu ici de juger ou de commenter des décisions, sur les choix du développement moderne. Comme dans toute chose, des aspects positifs et des aspects négatifs. Simplement les faits.
Au nom du remembrement imposé par la loi, pour une agriculture intensive, pour faire face à une autonomie alimentaire, pour nourrir une population croissante, pour soutenir le commerce extérieur, etc.... :
- 530.000 Km de haies ont disparu entre 1970 et 1991
- 130.000 hectares de haies et de chemins enherbés ont été supprimés entre 1991 et 1995.
- 14.7 millions d’hectares remembrés entre 1945 et 1993
Avant les années 1970, les apiculteurs faisaient des récoltes successives tout au long de la belle saison. La nouvelle génération d’apiculteurs cherche les bosquets, pour implanter leurs ruchers.
Haie sauvegardée de pruneliers sauvages
Le paysage s’est modifié du fait de la monoculture. Cette mutation a entraîné des bouleversements sur l’environnement. On s’en est aperçu tardivement ; on n’a pas voulu y remédier tant que « la maison ne brûlait pas ».
Prunelliers, ronces, aubépines, lierres, acacias, pommiers sauvages, poiriers sauvages, merisiers…………beaucoup ont disparu de nos campagnes.
Merisiers en fleurs
L’implantation massive de champs de colza et de tournesols a été accueillie comme une véritable manne financière. Ces deux plantes, hautement nectarifères et mellifères, ont, augmenté les rendements de miel dans les ruches, augmenté le nombre de ruches, favorisé l’accroissement du nombre d’apiculteurs professionnels. Epoque glorieuse jusqu’au commencement de la fin, avec le début de l’hécatombe des abeilles, dû aux traitements phytosanitaires.
L'augmentation massive de ruches, la concentration de ruches sur une même zone, la transhumance, tout cela a fragilisé les colonies.
Le Gaucho, le tristement célèbre insecticide, au nom de la rentabilité de la culture, va entraîner la perte d’un nombre inquiétant de ruches, dans tout le sud ouest de la France. Les apiculteurs, et autres structures syndicales, regroupés en un seul mouvement de coordination, va faire pression sur le ministère de l’Agriculture et obtenir la loi « Barnier ». Celle-ci va attribuer le principe de précaution en matière de protection à l’environnement, et fait interdire le Gaucho. Même une requête déposée auprés du Conseil d’Etat, par le fabricant, est débouté en 1999.
Mais le gaucho n’est pas le seul en cause dans la disparition des abeilles.
Les traitements insecticides sont les plus mortels pour les abeilles. On les retrouve ailleurs que pour les cultures, dans les traitements vétérinaires et environnementaux (campagne de démoustication) ; les moustiques meurent ainsi que les abeilles, les coccinelles, les bourdons….
Des nouveaux insecticides sont apparus sur le marché à partir de 1990 : des neurotoxiques.
Des essais scientifiques, faits par le CNRS et l’Inra, ont démontré que ces nouvelles molécules (imidaclopride et fipronil) causent aux abeilles, des troubles du comportement (troubles de la reconnaissance des congénères, du butinage, de l’orientation…) entraînant des baisses de population et de production de miel.
Les nouvelles méthodes du travail de l’agriculture entraînent un déclin de la diversité des végétaux :
- emploi de désherbant sélectif : plus de coquelicots, bleuets, mélilots, ravenelles…..dans les champs
- ensilage : l’herbe des prairies est coupée avant les floraisons
- la diversité de variétés d’arbres fruitiers en arboriculture décroît pour favoriser des variétés très productrices.
Coquelicots (photo de Zabette)
L’urbanisation a contribué également à restreindre les champs d’action des butineurs. Les agglomérations ont poussé comme des champignons, avec l’explosion démographique.
La société de consommation demande de plus en plus de légumes et fruits stéréotypés, calibrés ; alors pschitt…..pschitt, sur les fruitiers et les cultures maraîchères ; tant pis pour les abeilles ; à cet l’instant, l’alarme n’avait pas encore retenti.
L’accès des produits phytosanitaires pour le particulier (pesticides, insecticides, désherbant total ou sélectif), provoque aussi le déclin de l’abeille. Désherbants oignons, betteraves, carottes, fraisiers……….., insecticides pour chenilles…… dernier round, pour les abeilles, coccinelles………….heureusement certains de ces produits sont interdits à la vente maintenant. Evitons de trop les employer. Recherchons les produits alternatifs. Adeptes de la facilité dans nos jardins, nous avons oublié les principes de base des anciens. Rien ne vaut qu’un bon désherbage manuel, un bon purin bio, et tant pis, si le potager n’est complètement « clean ».
Les herbes folles, elles adorent, nos petites amies.
Effet inattendu : la diminution des exploitations agricoles, favorisent le retour des terres agricoles, en forêt ou en friches. Zones particulièrement protégées des traitements phytosanitaires, elles deviennent le refuge de ruchers.
Bruyères sauvages
Une nouvelle politique appuyée par les techniciens des Chambres d’Agriculture : le retour des haies dans nos campagnes. Chaque année depuis 1990, des kilomètres de haies sont replantés, et constituent des nouveaux bosquets, taillis mellifères.
Le tourisme vert, le tourisme rural, une chance pour les apiculteurs. Les citadins deviennent amoureux de nos campagnes, de leurs campagnes ; ils découvrent les bienfaits d’une agriculture, redevenue ou en cours de redevenir raisonnée ou bio. Ils sont sensibles à un environnement de qualité. Les apiculteurs en profitent pour ouvrir les portes de leur commerce et montrer leurs ruchers. Démonstration, observation, dégustation de miel.
L’abeille a retrouvé ses défenseurs, nous –mêmes.
Les temps changent, le monde change, nos habitudes aussi. Les prises de conscience sont là.
Mais sournoisement, un drame attend ; les abeilles sont en sursis ;
A suivre : le mal du XXIème siècle des abeilles : le symptôme d’effondrement des colonies
Qui sera suivi par : la protection des butineurs, les actes positifs que chacun peut faire dans son jardin.
